Il n’y aura pas de ZAD à l’Alma

À Roubaix, le projet de renouvellement urbain du quartier de l’Alma-Gare est fermement contesté. Mais derrière ces voix anti-démolition, la parole des habitants et habitantes sonne différemment. Ils n’y croient plus et, malgré l’amour pour leur quartier, n’acceptent plus de vivre dans des conditions déplorables. 

Rue Archimède à Roubaix, un mur anti-émeute s’est dressé. Gris, haut de presque trois mètres, infranchissable. Derrière, de bas immeubles en briques rouges, des fenêtres murées, le grondement des travaux. “Ils ont détruit mon quartier”, souffle une mère de famille. Ses deux enfants jouent dans les gravats. Dessous, la pelouse de son enfance. Ce 31 janvier 2024, une cinquantaine d’habitants et militants se sont retrouvés au cœur du quartier historique de l’Alma Gare. Ici, 480 logements vont être détruits et 390 rénovés. “Ramenez vos matelas, vos chaises, vos barbecues. On va bloquer leur calendrier. À partir d’aujourd’hui, on va occuper le chantier”, lance au microphone Florian Vertriest, habitant et porte-parole du collectif militant Non à la démolition du quartier de l’Alma.

Un mur anti-démolition a été construit pour empêcher les militants de troubler le chantier, © Malo Janin

L’Alma n’en est pas à sa première lutte. A l’aube des années 70, un projet de rénovation urbaine imagine la construction de grands ensembles et le départ de nombreuses familles. Les habitants se mobilisent, refusent de voir leurs courées historiques remplacées par des “cages à lapins”. Le premier Atelier populaire d’urbanisme de France se met en place en 1974 : accompagnés d’architectes et d’urbanistes, les habitants façonnent un quartier à leur image. Des logements en briques, communiquant les uns avec les autres grâce à des coursives. Les gamins les parcourent, les voisins s’y croisent chaque jour.

Parfois, des barbecues ou apéros s’organisent dans ces étroits couloirs. Derrière les fenêtres, les appartements sont spacieux,”parfaits pour accueillir des familles nombreuses”, explique Eric Mouveaux, habitant du quartier depuis les années 90. Dehors, de l’herbe, des arbres, des jardins. Grâce aux parkings souterrains, les voitures n’envahissent plus les rues.  Quelques façades d’immeubles sont incrustées de mosaïques. Elles représentent des têtes d’animaux. La chouette pour la vigilance, le taureau pour la force, le loup pour la cohésion… elles symbolisent les valeurs de celles et ceux qui font l’Alma.

Aujourd’hui, les petits immeubles maintenant vides tombent en ruine. Plus de vitres aux fenêtres, plus de fenêtres non plus. Seulement de larges trous dans les murs et des morceaux de verre au sol. Tuyauterie arrachée, une baignoire est restée, dernière trace des anciens locataires. Plus de trois quarts des familles sont déjà parties depuis le début du projet de renouvellement urbain de l’Alma, lancé en mai 2019, porté par la MEL (Métropole Européenne de Lille), l’Agence Nationale de Renouvellement Urbain (ANRU) et la ville de Roubaix. Au total, 670 familles sont concernés par le relogement.

La police est présente sur le chantier de démolition suite à l’occupation, © Malo Janin

Pour les militants, il faut sauver les derniers murs. On partage des chips, un verre de jus de fruit, une fanfare joue. Les jeunes du quartier arpentent les bâtiments délabrés, grimpent sur leurs toits. Mais l’euphorie de l’occupation sera de courte durée. Au bout d’une heure, les forces de l’ordre pénètrent sur le chantier. Le commissaire Abdelkader Haroune, figure de Roubaix, est présent. La tension est palpable, la répression efficace. Un homme âgé est traîné au sol, un adolescent et deux musiciens mis à terre. “Li-bé-rez, le goûter !”, scandent les plus petits, écoliers et collégiens. Après l’expulsion, le grand portail donnant accès au chantier est refermé. Les jours suivants, les quelques accès restants sont murés. Il n’y aura pas de ZAD à l’Alma.

L’Alma, une grande famille

Ce décor abîmé est à  l’image de la grande famille qu’est l’Alma, démantelée. Eric Verbrackel, sociologue et militant associatif, a vécu là quand il était étudiant. “ Être à l’Alma, c’était faire partie d’une vie sociale riche et diversifiée”, se souvient-il. Les habitants impliqués dans le projet de l’Atelier populaire d’urbanisme créent de nouvelles institutions, pensées pour le vivre ensemble. Au milieu du quartier, la cour de l’école Elsa-Triolet est ouverte. Elle s’installe sur la place de la Grand-Mère, et côtoie la maison de retraite. Les enfants grandissent avec leurs aînés, ils rentrent chez eux par les coursives. “Quand l’un d’eux faisait une connerie, les parents le savaient avant même qu’il rentre à la maison”, raconte un habitant. Une imprimerie voit le jour, elle diffuse un journal de quartier. Les pannes, problèmes d’éclairage et de propreté sont réglés en interne, par un système de régie de quartier. L’Alma est une petite communauté, un village dans une ville. Quand il était étudiant, Eric a écrit sa thèse sur ce quartier. L’homme a maintenant les cheveux blanc “Je n’ai jamais revu cela ailleurs”, souffle-t-il.


Des grillages bloquées, des digicodes pour entrer. En 30 ans, le visage du quartier a bien changé. Eric Mouveaux a du mal à le reconnaître. À deux pas de l’école Elsa Triolet où il a vu ses enfants grandir, il pousse une des nombreuses grilles qui mènent aux fameuses coursives de l’Alma, ces couloirs perchés qui facilitaient le lien social. “Je vais vous demander de sortir. C’est une résidence privée ici, c’est pas le quartier”, assène une habitante. “C’est devenu un bunker ici ou quoi ?”, ironise un jeune homme témoin de la scène. Éric garde le sourire mais ne cache pas son émoi : “Ces grilles n’étaient pas là avant, et on voit bien l’effet. On a perdu son voisin, on n’est plus dans l’esprit d’un quartier qui vit ensemble”. Dès les années 90, une partie des sous-sols et coursives sont fermés par LMH, pour enrayer l’insécurité dans ses bâtiments. “Ils auraient pu mettre un gardien pour surveiller les trafics, mais ils ont préféré ne concerter personne et condamner les parkings”, regrette Eric Mouveaux.

Une fenêtre murée sur l’un des bâtiments qui sera détruit, © Malo Janin

Avant qu’ils nous enferment, c’était une dinguerie le quartier”, s’exclame Aminata*, née à l’Alma dans les années 90. “Tu entrais dans un bâtiment, tu sortais trois cents mètres plus loin à la salle de sport”. Au centre social, elle et une quinzaine de jeunes se retrouvent tous les jours. C’est un peu leur lieu de vie, d’échange, de soutien. Aujourd’hui, ils se rappellent leurs souvenirs d’enfance à l’Alma. “Dès qu’un nouveau arrivait au quartier, il devait boire la potion, de l’eau et de la terre”, rigole son amie Fati*. RDA (Rue d’Archimède), RDF (Rue de France), Secteur Salle : ces acronymes sont les étendards des enfants du quartier depuis les années 90. L’Alma leur colle à la peau, et malgré ses difficultés, il faut se serrer les coudes, en faire une fierté. “Y avait pas les filles et les garçons d’un côté, c’était tout le monde ensemble, c’était la famille”, explique-t-elle.

Il y a une solidarité à l’Alma qu’on ne retrouve nulle part ailleurs”, constate Amélie Breton, travailleuse sociale à France Horizon – association d’accompagnement social. Depuis mai 2019, elle tient une permanence pour la société 3F Notre Logis. Elle fait le lien entre le bailleur et ses 160 foyers concernés par le renouvellement urbain. “Quand une famille s’en va, tous les voisins viennent aider pour le déménagement”, explique-t-elle. Ses cinq années passées à l’Alma n’ont pas été des plus faciles : annoncer le relogement aux familles, leur trouver des propositions qui correspondent aux attentes. “Dans l’idéal, on essaye d’améliorer la vie des gens, explique-t-elle, mais un logement plus confortable ne remplace pas 30 ans de vie dans un quartier aussi soudé.”

L’utopie perdue

Mars 2024. Dans les entrées d’immeubles face au “Mur de Berlin”, surnom donné au mur anti-émeute protégeant le chantier, des affiches annoncent une campagne de “Dératisation, Infection, Hygiène”. À l’Alma, les blattes, cafards et rats vivent avec les habitants. “ Y’a des souris partout”, s’exclame un habitant de la rue Archimède. Le jeune homme vit avec sa mère et ses frères. Ils ont accepté une troisième proposition de relogement, dans une maison. “On est même plus chez nous, c’est les souris qui sont chez elles.” Le jeune homme rit jaune. Il n’est pas le seul à partager son appartement avec des rongeurs. “Ici, tout moisit, déplore une jeune femme. Franchement, on a l’impression d’être de la merde”. Dans les coursives qui parcourent les immeubles, les dalles ont été remplacées par un nid d’abeille en plastique noir et des gravillons. Les habitants l’appellent la “litière à chat”, et pour cause. “Depuis qu’ils ont mis ces graviers, les chats font leur besoin partout, se plaint la jeune femme, c’est rarement nettoyé”.

Dégradation. Le mot revient dans toutes les bouches. Une dégradation palpable, matérielle, accentuée par les délogements. “L’Alma, c’était un contre-modèle qui faisait peur aux institutions. Ils ne voulaient pas que ça marche”, explique Eric Verbrackel. Ils, ce sont les bailleurs sociaux, Lille Métropole Habitat (LMH) en charge de 320 logements sociaux sur le quartier, mais aussi la Ville. Pour Maxime Bitter, directeur général de LMH “le projet de l’Alma était utopique, il s’est percuté à des réalités sociales et économiques”. 

Rue d’Archimède, les habitants ont passé plusieurs hivers sans eau chaude, © Malo Janin

L’architecture sociale de l’Alma avait un prix. Ses grands appartements n’étaient pas donnés à tout le monde. Dans les années 80, les habitants des classes moyennes acceptaient de payer cher pour vivre l’aventure de l’Alma. Mais pour Christian Carlier, conseiller municipal de Roubaix à l’opposition, la démocratisation des APL a eu un effet ségrégatif. “Elles permettaient à ceux qui avaient très peu de revenus de continuer à payer leur loyer, explique l’ancien habitant du quartier, mais quand tout s’est dégradé, les classes moyennes ont préféré payer moins cher ailleurs pour de meilleurs logements”. Les logements sociaux de l’Alma sont majoritairement des PLAI, réservés aux locataires en situation de grande précarité. “L’accès à l’habitat social repose essentiellement sur les APL”, confirme Maxime Bitter. Petit à petit, les foyers les plus aisés ont quitté le quartier, et les plus modestes se sont regroupés à l’Alma Gare.

Les institutions qu’on avait mises en place n’ont pas été portées par la mairie. Certains dispositifs, comme la régie de quartier, se sont peu à peu transformés en un dispositif éloigné des habitants, puis ont été liquidés”, déplore Christian Carlier. Pour David Guiraud, député La France Insoumise de Roubaix, “la mairie s’est désintéressée du dossier Alma et s’est réveillée après des années de délaissement des habitants”. Contactée à plusieurs reprises, la mairie n’a pas voulu répondre à nos sollicitations.

Au cinquième étage du siège de Lille Métropole Habitat, Maxime Bitter concède cet abandon au fil des années. “ Ce que l’on peut taxer au bailleur, c’est le défaut d’entretien”. Et pourtant “j’envoie des équipes pour s’occuper des parties communes, récupérer les poubelles…”, assure-t-il. Infiltrations d’eau dans les sous-sols et bâtiments… La destruction est devenue inévitable. 

« Non à la démolition, oui à la rénovation »

Mais elle reste inimaginable, pour certains. Florian Vertriest entre dans le centre social de l’Alma Gare. Il adresse un bonjour, serre une main, une autre : à l’Alma, il connaît du monde. En 2022, l’éducateur sportif de 30 ans s’est emparé de la lutte anti démolition du quartier. Un soir, il se baladait près du foyer des personnes âgées, et est tombé sur un flyer convoquant les habitants à un “diagnostic en marchant”. Un moment au cours duquel  élus, habitants et urbanistes déambulent dans un lieu afin d’élaborer un projet commun. C’est comme ça qu’il entend parler du projet de démolition, deux ans après son lancement. “Les habitants n’avaient jamais été consultés pour ce projet”, déplore-t-il. 

 Il a lancé un collectif qui s’y oppose. Des réunions sont organisées, rassemblent jusqu’à 200 personnes. Comme leurs aînés dans les années 70, les militants travaillent sur un contre-projet : une maison de la danse, des panneaux photovoltaïques, la rénovation de tous les logements. Ils espèrent un quartier ouvert sur la ville, organisé pour attirer la mixité sociale. 

Un mur tagué « Non à la démolition », slogan du collectif militant, © Malo Janin

Mais pour certains habitants, ce contre-projet arrive trop tard. A l’Alma, plusieurs foyers vivent sans eau chaude l’hiver depuis des années. Aujourd’hui encore, certains bâtiments n’ont aucune poubelle de tri, les déchets, parfois, sont déversés à même le sol. “Je suis triste pour les grands-parents qui vivent ici depuis plus de 40 ans. Mais moi mon bâtiment n’est pas vivable, qu’ils le détruisent”, grince Mehdy*, travailleur au centre social. “Leurs actions retardent le chantier, et nous, ça nous empêche de partir”, renchérit-il. Pour les mères de famille, quitter l’Alma c’est aussi éloigner leurs enfants du trafic de drogue. “Je ne veux pas que mon fils de deux ans voit des dealers trainer en bas de chez nous toute sa vie”, affirme Aminata. 

“Le deal, c’est une réalité de l’Alma. Tout le monde le sait”, assure Christian Carlier. Une réalité qui n’existait pas à l’époque de la première révolution urbaine, qui s’est installée peu à peu, a pris place dans les coursives et devant les bâtiments du quartier. “ Le problème du deal est lié aux réalités sociales de l’Alma”, pointe l’élu de l’opposition. Une solution pour les petites mains précaires et en quête d’un peu d’argent. Mais pour les habitants, les dealers qui tiennent aujourd’hui les murs et entrées du quartier ne sont pas de l’Alma. “On ne les connaît pas”, affirme une jeune femme de la rue Archimède. “Ce ne sont pas des jeunes de chez nous, donc on n’a aucune prise sur eux”, déplore Christian Carlier. La présence policière est familière dans les rues de l’Alma. Des opérations dites de “nettoyage” et de lutte contre le trafic, à l’image de Roubaix XXL au mois d’avril 2024, ont été menées dans le quartier. Mais le trafic persiste, fait partie du quotidien des habitants, nourrit leurs inquiétudes et leur colère.

“Il y a une vision fantasmée de l’Alma”, affirme Maxime Bitter, directeur général de LMH à propos des militants anti-démolition. “L’attachement pour le quartier ne doit pas occulter les problématiques qui existent à l’Alma”, ajoute-t-il. Ségrégation, précarité, insécurité…pour le directeur général “ la plupart des personnes ne veulent pas revenir à l’Alma. Et sincèrement, qui a envie de s’y installer ?” L’Alma doit changer, devenir un quartier agréable et attractif. Cette vision, portée et partagée par la municipalité, se réaliserait seulement avec une profonde métamorphose du quartier. “Il y aura toujours des logements sociaux, assure Maxime Bitter. Mais l’idée, c’est d’avoir aussi du logement locatif libre et de développer l’accès à la propriété dans le quartier”. Ces logements ne seront pas construits avant 2030. Il faut d’abord “rendre le quartier attractif” aux yeux des “autres”, les étudiants, les classes moyennes, les plus aisées, quitte à détruire tout un passé. 

Dans ce hall d’immeuble, la moisissure a gagné le bâtit, © Malo Janin

De plus en plus impuissants face à un projet déjà bien avancé, les militants bataillent au moins pour informer les habitants sur leurs droits. Sur l’une des nombreuses coursives de la rue Archimède, un vieil homme concerné par le relogement sort de son appartement et croise le regard d’Éric Mouveaux, président de l’Amicale des locataires motivés de l’Alma. “Vous savez qu’il ne faut pas accepter la première proposition, vous avez le droit de refuser trois propositions en tout”, prend-il le temps de lui expliquer. Elles doivent correspondre à des critères demandés au préalable, lors de l’enquête sociale. “ Si une personne a 250m2 à l’Alma, elle doit pouvoir prétendre à un logement de la même taille ”, explique Florian Vertriest. L’éducateur dénonce les méthodes des bailleurs qui mettent la pression aux locataires pour les faire partir au plus vite. “Imaginez une maman de plus de 60 ans qui a toujours vécu ici. Un jour, elle se retrouve face à trois chargés de relogement qui lui disent soit vous acceptez l’une de nos trois propositions, soit on vous met dehors”.

Amélie Breton, chargée de relogement pour le bailleur social 3F logis, conteste une quelconque forme de pression. “On fait tout pour que les gens accèdent à un logement qui correspond à leurs attentes et à leurs envies”, affirme-t-elle. De longues discussions, beaucoup de médiations… au final la plupart des habitants ont pu déménager ailleurs. Mais la travailleuse sociale est réaliste. “Les logements qu’ils avaient ici sont magnifiques. Je n’ai jamais vu cela ailleurs et malheureusement, ce sont des biens qui n’existent pas sur le marché actuellement”, se désole-t-elle. Il ne lui reste plus qu’une petite trentaine de famille à reloger. Elle quittera bientôt son petit bureau sans fenêtre, au rez-de chaussé d’un des célèbres bâtiments à tête d’animaux imaginé par l’architecte Gilles Neveux, voué à disparaître. 

Les derniers jours du village

À cinq minutes à pied de la gare de Roubaix, le quartier vit encore ses derniers moments de village. Aux fruits de la passion, épicerie installée depuis 1983 rue de l’Alma, le patron note les comptes des familles habituées sur les lignes de son carnet à spirale. Ici, les enfants passent en courant prendre des paquets de bonbons, les courses des parents, et repartent sans payer. “J’ai vu avec ton frère hier, je vous dois 30 centimes. C’est Ramadan, je vais pas te voler ! ”, lâche une grand-mère à l’épicier. “Alors je vais devoir faire attention quand ce sera fini ?”, lui répond-il, un sourire en coin. “Ça me rend triste de quitter le quartier, mais les bailleurs ont racheté les locaux, alors je dis pas non à une retraite anticipée”, lâche le patron, après quarante ans d’activité.

Sur les murs de la salle de sport, le lieu de retrouvailles du quartier, s’étale une gigantesque fresque sur laquelle sont gravés les mots “Famille Almacity”. Le boxeur Foudil Hamdoud, les groupes de hip-hop Newdance Street et Funkadelic Force… Ces icônes de l’Alma des années 2000 sont dessinées sur les briques rouges. Au printemps, quand l’air se fait plus chaud et que les journées s’étirent, le parvis de la salle se remplit. Les mères bavardent, les petits disputent des parties de football, les jeunes se posent sur les bancs. “On jouait là-bas quand on était gosses, et aujourd’hui, on revient avec nos enfants”, sourit Fati. 

Papysse, illustrateur du quartier, devant la fresque qu’il a réalisée, © Malo Janin

C’est Papysse, illustrateur et habitant du quartier qui a réalisé cette fresque avec des jeunes de l’Alma, il y a un an. Bientôt, Papysse s’en ira. Avec sa famille, ils viennent d’accepter leur troisième offre de relogement. Une maison neuve, loin des rats et des coupures internet de la rue Archimède.

Kamil*, vingt-deux ans, habite encore le quartier. Assis au volant de sa voiture, il regarde les murs qui ont abrité son enfance et sourit tristement : “C’est dur d’habiter ici maintenant que mes amis sont tous partis”.